Nous étions en fin d’exercice. Après un tour d’écoute à 40 m, nous sommes
remontés à l’immersion périscopique pour faire un tour d’horizon au périscope
de veille. Le commandant demanda de faire surface pour regagner Lorient au
plus vite. La mer était calme.
Nous venions de monter à la passerelle le commandant, l’officier de quart
et moi-même, lorsque tout à coup, quelle ne fut pas notre surprise !
Un pigeon voyageur se posa au sommet du kiosque à l’avant de la baignoire.
Nous ne voulions pas l’effrayer et nous avons attendu un moment. Il finit
par s'approcher de la passerelle. A notre grand étonnement, le pigeon
ne bougeait pas, il se laissa prendre en main sans broncher. Il avait l’air
d’être totalement exténué. Le commandant prit l’animal, le posa sur la table
à cartes et demanda que l’on apporte à boire, à manger et, si possible, un
récipient, une gamelle, et enfin, de quoi le nicher. Le commis nous amena un
carton un peu plus grand qu’une boîte à chaussures, de l’eau et du pain.
Nous ne savions pas quoi lui donner à manger. Il n’avait vraisemblablement
ni faim, ni soif. Nous sommes rentrés à Lorient quelques heures plus tard.
Au premier plan, on aperçoit quelques morceaux de pain pour l'attirer.
Au demeurant, il avait l'air d'y jeter un oeil plus qu'intéressé...
Tout l’équipage se mit à défiler pour voir notre nouvelle recrue. La nuit se
passa bien. Le lendemain matin, il n’avait toujours pas touché aux aliments.
L’inquiétude monta sérieusement. Entre temps, le commis était passé aux
cuisines de la base et avait pu se renseigner et il ramena de la nourriture
plus appropriée mais le pigeon ne mangeait toujours pas. Ce n’est seulement
qu’en tout début d’après midi que notre volatile se décida enfin à se
restaurer. Dans le milieu de l’après midi, il s’est envolé pour venir se
poser immédiatement sur le bord de la baignoire. Il n’était pas farouche du
tout et se laissait facilement caresser.
En fin d’après midi, juste avant le coucher du soleil, il s’envola, tournoya
2 ou 3 fois autour de la base. Nous le voyions très bien de la passerelle.
Puis, il reprit son vol interrompu une journée et demie auparavant. Il était
tout simplement fatigué, bienheureux qui comme la VENUS se trouva sur son
chemin …. Sinon, que serait-il advenu de ce charmant oiseau ? Tout au
moins c'est ce je pensais...
Mais la fin est tout autre, Il n'a pas pris la poudre d'escampette, il a du
revenir se poser sur la kiosque, et l'histoire ne se termine pas là...
Un récent mail de Claude BRIDON Patron Détecteur de l'époque nous raconte :
« L'officier en second m'a chargé de recherches et j'ai trouvé un colombophile,
boucher/charcutier de son état à "Keriado", après contact avec lui
j'ai embarqué le volatile sur la banquette arrière de ma 403 pour le
remettre à ce colombophile avec autorisation spéciale pour franchir le poste
de douane/gendarmerie maritime de la base.
Gabelous (douaniers) et gendarmes étaient très intéressés par ce pigeon dont
je leur ai fait voir la bague. C'est ce boucher qui s'est chargé de le
rapatrier à son propriétaire un club du Nord.
Je suis revenu avec une prime de reconnaissance en saucissons, andouilles et
autres charcuteries que j'ai ramené à bord. »
L'histoire se termine bien pour le pigeon qui a retrouvé son maître qui plus
est : comble de l'histoire un Ch'ti, un bled quoi !...
Mise à jour le 20 janvier 2011.